ça c'est une date qui compte !!!!!!!
Une Bastille d'injustice est tombée.....
Toutes les bastilles, tous les murs tombent un jour. A quand la chute du mur de discrimination chez les catholiques ?
Femmes évêques… et ce n’est pas une blague !

Cette décision est intéressante à plusieurs niveaux :
D’abord, elle rappelle le fonctionnement démocratique de l’Église d’Angleterre. L’organe décisionnaire de l’Église, le Synode Général, est composé de trois Chambres, celle des évêques, celle du clergé et celle des laïcs. Les laïcs sont élus localement par les conseils de paroisse ; ainsi, même avant la présence de femmes au sein du clergé, les femmes anglicanes pouvaient participer aux débats et aux décisions de leur Église. Pour les votes importants, la majorité des deux-tiers est requise dans chacune des Chambres.
On peut également noter la spécificité de la Communion anglicane qui admet que ses différentes Provinces, nées de la colonisation et de l’émigration anglaise, agissent de manière relativement autonome. Ces Provinces ont obtenu, en 1968, l’autorisation d’ordonner des femmes prêtres si elles le souhaitaient, permettant aux différents pays d’évoluer à leur rythme. Ainsi, l’Église épiscopalienne des États-Unis a ordonné ses premières femmes prêtres en 1976 et consacré sa première femme évêque en 1989. A contrario, certaines Provinces africaines refusent toujours l’ordination des femmes. Il faut ici préciser que, contrairement à ce que certains catholiques aiment bien laisser croire, ce n’est pas la question de l’ordination des femmes qui met actuellement en péril l’unité de l’Église anglicane, mais la question de l’homosexualité des clercs. Les diverses situations des Provinces quant au ministère féminin sont respectées et ne remettent pas en cause la Communion.
Il faut aussi rappeler que l’Église d’Angleterre est d’abord une Église de compromis, une sorte de via media entre catholicisme et protestantisme qui concilie, en son sein, des tendances très diverses, de l’aile anglocatholique proche de Rome, à l’aile évangélique, proche des protestants fondamentalistes. On peut ainsi comprendre que, sur la question du sacerdoce comme sur celle de l’épiscopat féminin, les opposants se concentrent essentiellement dans ces deux pôles. Certains anglocatholiques sont hostiles à ces évolutions en raison de la volonté de ne pas créer d’obstacle au rapprochement avec Rome, dans un souci de préserver la succession apostolique et parce que le prêtre agit ‘in persona Christi’, ce qui impliquerait nécessairement qu’il soit un homme. En janvier 2011, Benoît XVI a créé l’Ordinariat Notre-Dame de Walsingham pour accueillir les anglocatholiques qui souhaitaient quitter l’Église d’Angleterre en raison de leur opposition à l’épiscopat féminin. À l’autre extrémité, certains évangéliques s’opposent au ministère féminin en raison d’une interprétation littérale de la Bible qui implique que l’autorité ne peut émaner d’une femme (se fondant notamment sur 1 Co 11, 3-10). Déjà opposés à la prêtrise des femmes, les évangéliques considèrent l’épiscopat féminin comme une véritable aberration théologique, puisque des femmes auraient alors autorité sur des clercs hommes et pourraient les ordonner.
Dans l’Église d’Angleterre, les opposants et les partisans du sacerdoce féminin se sont affrontés jusqu’en novembre 1992, date à laquelle les femmes ont pu accéder à la prêtrise (les premières furent ordonnées au printemps 1994). La question de la protection des opposants s’est posée dès le départ et a conduit, en novembre 1993, à l’adoption d’une mesure instituant une discrimination officielle. Ce texte prévoyait la possibilité pour les paroisses qui le souhaitaient de refuser la nomination d’une femme prêtre et instituait des évêques ‘volants’ qui n’ordonnent pas de femmes et ont donc ‘les mains propres’ pour se charger de la protection épiscopale des paroisses opposées au ministère féminin. Cette législation, aux relents de croyances misogynes en l’impureté féminine, fut vécue par les femmes prêtres comme un déni très blessant de leur identité et un frein à leur acceptation pleine et entière dans l’Église. C’est notamment parce qu’elles voulaient éviter un texte reproduisant ces erreurs et les maintenant dans un statut de ‘seconde classe’ qu’il a été si long et difficile de parvenir au vote d’une mesure ouvrant l’épiscopat aux femmes. En effet, les opposants, pourtant très minoritaires, se sont organisés pour se faire élire en masse au Synode Général et ainsi peser sur les choix de l’Église afin d’obtenir des garanties pour se ‘protéger’ contre les femmes évêques. Contrairement à l’image donnée en novembre 2012 par le rejet de la législation (à six voix près), celle d’une Église en rupture avec les attentes de la société civile, l’immense majorité des anglicans soutenaient l’ouverture de l’épiscopat aux femmes. Si la motion avait de nouveau été rejetée cette fois-ci, le parlement britannique avait menacé de lever l’exemption duSex Discrimination Act dont l’Église bénéficie et d’obliger ainsi légalement l’institution à appliquer l’égalité des sexes.
Le texte accepté ce 14 juillet permettra sans doute la consécration d’une femme évêque avant la fin de l’année 2014. Il abroge le texte de 1993 et lève toute barrière légale empêchant les femmes d’évoluer dans la hiérarchie anglicane. L’égalité des sexes pourrait donc bien s’accomplir dans une institution où 25 % des prêtres et la moitié des ordinands sont des femmes. Il demeure néanmoins des défis importants à lever pour prouver qu’il ne s’agit pas que d’un changement superficiel : les femmes sont, pour l’instant, surreprésentées dans le clergé bénévole, subissent parfois encore la culture paternaliste de l’Église et peinent à proposer la liturgie inclusive dans les paroisses conservatrices. La législation qui vient d’être votée rend toutefois possible le rêve d’un avenir de mixité et d’égalité qui transformera nécessairement l’Église, en douceur, mais en profondeur.
Églantine Jamet-Moreau, auteur de « Le curé est une femme », L’Harmattan, 2012.
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