Nous vous avions annoncé
les ateliers Genre en Christianisme, dans les locaux de la bibliothèque du Saulchoir (Paris) les deuxièmes jeudi de chaque mois
----Celui de mai, décalé au
mercredi 7 dans nos locaux en raison du jeudi 8 férié, s’est tenu autour du livre
LE DENI, Enquête sur l'église et l'égalité des sexes (Bayard) en présence des deux auteures : Maud AMANDIER et Alice CHABLIS. Rappelons qu’il s’agit là d’une enquête implacable, étayée par une étude minutieuse des textes bibliques et des ordonnances du magistère sur l'organisation, pendant 20 siècles, de la répartition des statuts, rôles et pouvoirs entre les sexes dans l’Église catholique. Une vingtaine de participants pour la plupart très accrochés par la lecture du livre sont venus en discuter avec les auteures, deux femmes, encore jeunes, pertinentes, engagées comme chrétiennes sur le terrain pastoral et dans les médias catholiques. Elles ont mis en commun leurs expériences pour se lancer sans vraiment d’idées préconçues dans l'étude de ce qui pouvait justifier ce constat accablant que beaucoup, croyants ou non, font aujourd’hui : dans l’Église, les hommes ont le pouvoir, les femmes assurent le service.
"Au début, on voulait laisser la parole aux femmes, nous ont dit les auteures
. On a rencontré des femmes engagées, formidables mais avec toujours les mêmes thèmes ... Parcours bloqués, parcours brisés... Rapidement nous nous sommes dit : il faut analyser la structure"
Elles se sont montrées aussi passionnantes que simples, ouvertes et intéressées à la discussion. Nous nous sommes bien sûr mutuellement reconnu/e/s dans nos objectifs et nos convictions et des courriers d’échange et de soutien sont déjà venus prolonger cette première rencontre, d’autant que, comme vous l’aurez lu notamment dans
Témoignage Chrétien qui s’est fait un devoir et un honneur de défendre l’ouvrage, celui-ci fait l’objet d’une véritable censure dans la presse catholique.
En tout cas, nous comptons bien y revenir et inviter à une étude plus spécifique sur certains points de blocage que nous n’avons pas cessé nous-mêmes de dénoncer. Comme le faisait remarquer Maud Dillard, documentaliste de
Genre en Christianisme : «
Je salue cet ouvrage, synthèse de 40 années de publications ».
Si vous ne l’avez pas encore fait, attachez-vous à le lire et partager. Il est alerte dans son style bien que ce qu’il décrit soit pesant, et ses analyses étaieront utilement les projets du travail collectif pour un renouveau désormais urgent dans l’Eglise.
---Le jeudi 12 juin nous avons eu la joie d’accueillir
Pierrette Daviau professeure de théologie pratique et pastorale à l’université Saint Paul de Montréal sur le thème : «
quelle ouverture pour la parité femmes/hommes avec le pape François ? »
Dans un premier temps, Pierrette Daviau a expliqué comment les théologiennes catholiques nord-américaines réagissent au pontificat du Pape François. Assurément, des raisons de se réjouir sont pointées : un courant plus pastoral que dogmatique, la simplicité et l’humilité du personnage, le nouveau Secrétaire d’État et les mesures sur les finances du Vatican. Néanmoins, elle concède que, vu depuis l’Amérique du Nord, ce qui domine c’est l’idée qu’il n’y a rien de véritablement neuf… La dénonciation du « machisme en jupe » a peu convaincu. L’ordination des femmes reste encore soumise au verrou théologique mis par Jean-Paul II et elle note qu’au Québec le débat s’amenuise faute d’espoir rapide de changement… Dans l’encyclique
Evangelii Gaudium, sont toujours louées les qualités féminines naturalisées. Le rôle irremplaçable des femmes dans la famille reste idéalisé sans forcément rejoindre le vécu des femmes. Il parle de justice mais pas d’égalité femme/homme.
Dans un deuxième temps, Pierrette Daviau a surtout réfléchi sur la place de la théologie féminine ou féministe dans la théologie catholique romaine en général. Peu d’évolution également : les images de Dieu restent masculines, le langage liturgique peu inclusif…
D’un point de vue sociologique, les filières de théologie féministe restent marginales, peu connues, peu fréquentées, et peu estimées par les hommes. C’est peut-être cela qui a fait beaucoup réagir lorsque François a appelé à développer une « théologie de la Femme ». Pierrette Daviau se demande pourquoi le pape, cultivé, sud américain, n’a-t-il pas lu l’abondante littérature produite par la théologie féministe depuis 40 ans, en particulier Yvonne Gebarra ?
Le débat a porté sur ce qu’on pouvait raisonnablement attendre du pape François. Deux lignes : les « optimistes » pointent tous les lignes d’ouverture : la nécessité de réformer la Curie ; sa volonté de remettre à un juste degré l’articulation entre évêques et prêtres ; la priorité au message évangélique ; le prochain Synode des familles. Les « pessimistes » pointent : les risques d’attendre trop longtemps ; l’annonce d’une encyclique utilisant le thème de l’ « écologie » pour figer des rapports de genre ; l’impossibilité dans le futur proche, de voir changer les choses ; dire qu’il convient de donner plus de place aux femmes là où se prennent les décisions et tout de suite revenir à l’exemple de Marie...
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire